Tully Fidèle très pratiquant
Nombre de messages : 921 Age : 37 Localisation IG : Vienne (Duché du Lyonnais & Dauphiné) Date d'inscription : 29/07/2009
| Sujet: Saint Sylphaël, Archange du Plaisir Ven 23 Oct 2009 - 0:39 | |
| - Citation :
- Le rouleau de ce manuscrit fût trouvé au delà de la grand plaine dans l’une des grottes antiques de Mogao à Dunhuang et ramené par le Frère Guillaume de Rubrouck voici deux cent ans.
Moi, Nemrod Aggadoth qui fût témoin de la chute d’Oanylone par châtiment divin et ne dois vie sauve qu’au devoir que m’impose le Très-Haut de transmettre ce témoignage aux générations futures, délivre, au seuil de ma vie et à la postérité humaine, le récit détaillé de tout ce que j’y ai vu. …
L’incroyable destin de Sylphaël d’Hédon
En ces temps troublés pour la Cité vivait un jeune homme nommé Sylphaël d’Hédon. Il savait briller en société, était doué de talents en tous les arts mais ce qui faisait l’admiration de son entourage était son extraordinaire capacité à savourer chaque instant de la vie. Nous le croisions fréquemment en compagnie de deux complices de taverne, Colomba la Radieuse et Lucifer le Cyclothyme mais tandis que ce dernier s’enivrait à l’excès jusqu’à devenir violent peu avant le coma éthylique (donnant lieu au célèbre quolibet « quand Lucifer boit, Colomba raque ») Sylphaël, roi des nuits d’Oanylone, goûtait tous les vins puis partait légèrement titubant donner son concert de lyre au profit de l’association « sagesse amassée d’Oane ».On voyait alors toutes les torches de ses adulateurs chavirés l’envoyer droit au firmament. Souvent, le lendemain à l’aurore et après qu’il eût trouvé de nouvelles sources de délices en étudiant avec Colomba, il n’était pas rare de voir Sylphaël préparer une tisane au chevet d’un Lucifer aux traits ruinés, nauséeux, blafard. « tu confonds jouissance et bonheur, mon pauvre Luc ! » le sermonnait Sylph tandis que son ami s’apprêtait pour une journée de mortifications et d’autopunitions en tous genres car telle une girouette folle, Lucifer le versatile ne cessait de passer d’un état de soif de plaisir extrême à un abattement coupable et dépressif «et ainsi éprouves-tu très durement ton corps par d’incessantes privations, d’éternels excès » Quelque temps plus tard, Colomba, succombant au charme dévastateur de Sylphaël le voluptueux, l’épousa. Cependant malgré leur bonheur insolent les deux jeunes gens s’inquiétaient pour leur ami, qui comme bien d’autres habitants d’Oanylone, sombrait chaque jour plus gravement dans un abîme sans fond, mêlant la pratique d’inquiétantes coutumes sexuelles la nuit et , formulant d’étranges prières le jour, prostré et nu, au sommet d’une colonne sous l’œil bienveillant de la Créature sans Nom. Celle-ci oeuvrait désormais partout dans la ville, sortant de la pénombre, flairant ses proies parmi les décombres de plus en plus nombreux sous les coups de boutoir de la colère de Dieu car l’heure du châtiment avait commencé.
La rébellion des corrompus
La Créature Sans Nom avait trouvé facilement ses auxiliaires parmi les êtres les plus débauchés de la Cité au nombre de sept dont Lucifer le Cyclothyme et ces factotum diffusaient leurs mauvaises pensées avec déconcertante facilité, instillant dans les esprits égarés par la peur d’obscures idées telles que : «Dieu a créé les riches pour donner aux pauvres le paradis en spectacle » «l’humain retrouvera ses biens s’il ne doute point de la faiblesse de Dieu » «L'éternité c'est long, surtout vers la fin» tant et si bien que la colère ainsi attisée déclencha un massacre. Un matin nous retrouvions éventré dans les gravats et parmi bien d’autres, le corps de Colomba et pour la première fois je vis Sylphaël s’effondrer dans le même temps que s’écroulait la ville.
La Tentation
Deux jours plus tard tandis que la Cité en ruine se vidait de ses habitants j’aperçu Sylphaël courir en tous sens dans une ruelle. Son teint était blême. Il me fit ce récit : « Cette nuit je me réveillais brusquement sentant la présence sous mon drap d’une forme : celle-ci semblait peser à mes côtés puis s’enrouler autour de mes jambes jusqu’à ce qu’elle m’étreigne complètement. Je fus pris d’une angoisse oppressante cependant je croyais reconnaître dans cette forme le corps de Colomba, mon épouse défunte et en même temps que la terreur peu à peu m’envahissait j’étais empli d’un flot de tendresse immense à son égard mais je savais qu’elle n’était plus et ce sentiment cédait la place à une impression de manque et une douleur irrépressible soudain je compris que j’étais en proie à un extraordinaire maléfice je devais lutter de toutes mes forces pour ne pas céder à cette chose abominable. Sans doute paralysé par une peur intense j’avais les pires difficultés à me mouvoir et la chose m’emprisonnait comme un étau. Après d’interminables secondes je parvins à atteindre la lampe à huile (j’avais l’unique pensée de faire la lumière pour affronter le sortilège) mais la flamme ne s’alluma pas. Alors, cédant à la panique, je me débattais avec l’énergie du désespoir car cette fois-ci j’allais mourir je ne cessais de crier « vas-t’en » en litanie ininterrompue et de plus en plus fort à la force maléfique dont j’étais la victime. Mon pouls s’emballait, mon cœur palpitait si vite qu’il allait exploser, la chose desserra son étreinte puis je ne sentis plus rien j’allumais la lampe et cette fois-ci, étrangement, la lumière se fît. Le reste de la nuit j’ai médité sur cette tentative de possession de l’Innommable Créature et l’état d’acédie qui faillit me tuer lorsque j’étais pétrifié par l’angoisse. Il nous faut accepter le courroux de Dieu, et cette ville, ç’est bien nous qui l’avons condamnée à la destruction, je m’en vais rejoindre le groupe des vertueux. "pardonne-moi mon ami" lui dis-je "mais comment espères-tu incarner une vertu toi dont l'existence fût toute entière consacrée aux plaisirs ?" il répondit "mais parce que cette vertu est le plaisir même ! Dieu nous donna les sens pour le goûter et parce que l'amour de la vie reste l'Amour" sans s'attarder il partit prier pour sauver le monde en compagnie des Vertueux rassemblés à la septième Porte.
La cité d’Oanylone, bâtie en forme de cadran comportait huit portes correspondants aux subdivisions cardinales et la porte Ouest en était la septième, j’observais Sylphaël s’éloigner vers le couchant, ce fût la toute dernière fois que je le vis. Infiniment plus couard, je quittais la ville précipitamment sans arme ni bagage, avant l’ultime chaos. ainsi il restait désormais sept vertueux face à sept corrompus. Parmi les compagnons de fuite que je rencontrais par la suite, quelques uns avaient observé de loin le cataclysme final, l’engloutissement de la Cité et leurs témoignages concordaient aussi sur ce point, sept silhouettes avaient été vues, aspirées vers le soleil par des faisceaux ardents. Je fus heureux de penser à la destination finale de Sylphaël qui toute sa vie avait été rayonnant.
Au dernier souffle de ma vie je commence des croquis à la hâte tentant de transmettre des souvenirs visuels de la grande Cité d’Oanylone au monde des survivants. Puisse l’humanité toujours se souvenir de l’exemple des vertueux et du châtiment des orgueilleux. | |
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